Maîtres et chiens
Ici, plus d’enfants, mais des chiens, des chiens de tous poils. Le petit immeuble est devenu un véritable chenil. Les jeunes couples qui emménagent ne font plus de bébés. Ils sortent à heure régulière leur chien pour qu'il pose sa crotte dans le square d’en face. Les plus disciplinés la ramènent pliée dans un petit sachet plastique qu’ils abandonnent dans la poubelle verte que la municipalité hygiéniste de droite a installée au pied des feux tricolores.
A chaque rencontre, en attendant l’ascenseur, comme il faut rester en bon voisinage, chacun s’extasie sur l’animal de l’autre.
S'il est petit, on dit, il est vraiment trop mignon! S'il est un peu plus gros, on soutient avec conviction qu’il a l’air intelligent. Et pour les très gros, on s’exclame, oh! Mais c’est pas vrai, il a encore grandi ! On ajoute un peu inquiet, vous croyez qu’on va tous pouvoir entrer dans l’ascenseur?
Les soirs où l'air est plus doux, par les fenêtres entr’ouvertes, on entend des "Assis! Couchés! Debout! Au pied!" Papatte! Susucre!, C'est bien! Bon chien!" et parfois des "Attention! Pas ça! Connard! Ça va tomber! ", le tout mêlé d’aboiements joyeux ou inquiets.
A défaut d’avoir la maitrise de sa vie, chaque maitre s’essaie à maitriser son chien…