Ombres
Il semblait à moitié perdu. Du jour au lendemain on n’accordait plus de crédit à sa moitié raisonnable. Et je n’entendais plus ses peurs et ses angoisses. C’étaient les miennes. ll me disait qu’il voulait vivre, j’entendais qu’il voulait fuir, Je ne l’ai pas aidé.
Puis il y eut les ombres grises portées sur les murs de sa chambre.
Et il fit de chaque ombre une présence et la nuit qui effaçait l’ombre durait l’éternité.
Rien n’allait de soi: se lever, se déplacer, manger, boire, respirer. Dans ses rêves, il vivait très haut, en altitude, sur le toit du monde, là où chaque pas compte, chaque souffle. Il était alors précis (au mètre et à la seconde près) parce que le temps et l’espace lui étaient comptés.
Il est mort nu, tel un roi déchu.
Nous l’entourions. Je tenais sa main. Il était seul.
Du crématoire, rien, je ne me souviens de rien.