Anquetil pour moi tout seul
Publié le 19 Août 2012
Saint-Etienne, jardin public de Badouillère, année 58, jeu d'enfants.
D’une pichenette (le pouce fait ressort avec l’index), les gamins accroupis envoient leurs billes le plus loin possible. A
l’ombre d’un arbre, ils ont tracé à la main un circuit sinueux sur la terre de l’allée qui conduit tout droit à la Grand Rue. Chacun donne
à sa bille le nom d’un coureur : la mienne, rugueuse, mal dégrossie, c’est Gastone Nencini (il devait gagner le Tour de France en 1960). Mais comme je suis maladroit et que celui qui finit
dernier la course doit abandonner sa bille aux autres copains, je laisse prudemment ma bille Anquetil à la maison. Toujours. Je la garde précieusement dans la vitrine de mon lit cosy. C’est
la sphère la plus colorée, la plus lumineuse, la plus parfaite. Elle irise d’or mes rêves.
Anquetil, Fournel et moi.
Contrairement à Echenoz avec Zatopek (Courir), Fournel avec Anquetil (Anquetil tout seul) ne touche pas l’universel. Vous l’avez compris, son livre est fait tout exprès pour moi. Le 12 octobre 1958, j’avais 10 ans,
j’habitais à deux pas du Vel d’hiv, rue Désiré Claude, et je témoigne : Anquetil courut bien ce jour-là à Saint-Etienne. J’y étais et je l’ai vu et j’ai vu Paul Fournel.
Si vous voulez en savoir plus sur cette mémorable journée, lisez son livre jusqu’à la dernière page.
"Anquetil tout seul" Paul Fournel (Seuil)
"Courir" Jean Echenoz (Minuit)