série noire 2 



Elodie, jolie fille de 15 ans aux nattes blondes, écouteurs sur les oreilles, trottine sur le petit chemin qui mène au crêt des Ombres. A la croix Mesniel, elle prend dans la forêt le  sentier à peine marqué qui grimpe vers la cascade.  Arrivée au bord de la falaise, là où l’eau du ruisseau disparaît pour aller se fracasser tout en bas sur les rochers, elle sort son iphone. Il est 17h15. Elle est dans les temps. Elle vérifie une nouvelle fois que dans les heures à venir il va  pleuvoir. Elle devra rentrer vite, elle n’a  pas d’imperméable. Elle envoie un texto à sa copine Marie «G pl1 d'ID».

L’homme avance d’un pas tranquille. Comme tous les jours, à la même heure, beau ou mauvais temps, il fait sa promenade, mon dernier tour de piste, a-t-il l'habitude de dire en rigolant à ses copains du café de la joyeuse boule. A 17h30, quand il passe  à la croix Mesniel,  il entend un cri venant de la cascade. Un hurlement d’effroi et de douleur. Cela fait longtemps qu’il n’a  pas pris ce sentier trop pentu pour ses vieilles jambes. Mais il doit aller voir, quelqu’un a besoin d’aide.  Quand il parvient essoufflé  sur le petit replat herbeux, il n'y a personne, tout est silencieux. Il s’approche du bord de la falaise et se penche dans le vide pour scruter plus bas l’entrelacs d’eau, d’arbres et de rochers.

Monsieur, Monsieur, une voix douce appelle. Il se retourne. Elodie est  là, nue, presque à le toucher. Elle  sourit, une main posée sur sa poitrine, l’autre pointant sur lui une mince baguette de coudrier.

Bien que l’alerte soit donnée assez tôt dans la soirée, le corps n’est retrouvé que le lendemain, les fortes pluies  qui se sont abattues sur la région ont  rendu les recherches difficiles. L’homme brisé gît  dans les éboulis, la tête ensanglantée. Les gendarmes ont conclu à une chute  du haut de la cascade.  Les gens, même âgés, sont imprudents.

Dans le salon, Elodie  assise au coin du feu referme le livre que lui a passé Marie. "Les caves du Vatican" d’André Gide.  Elle observe parmi les bûches la fine baguette de coudrier et sa petite flamme orange qui crépite. Elle secoue ses nattes blondes, met ses écouteurs mauves, allume son iphone blanc, pose le doigt sur l’icône de Météo France. Bonne nouvelle, il pleuvra demain après-midi. Elle envoie un texto à Marie: "Lafcad C 1 mek vrMen b1".

 

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